Une biographie tendre et respectueuse, à la découverte d’un homme, dont l’œuvre poétique de l’auteur de la chanson la plus célèbre au monde : L’internationale, est fort peu connue, et pourtant elle est d’une humanité incroyablement bouleversante.

EXTRAIT

PRÉFACE

Eugène Pottier fut toute sa vie un travailleur acharné qui eut trop souvent à compter avec la misère.
Ce fut un militant qui, sans une heure de défaillance, lutta énergiquement et héroïquement pour l’avenir meilleur du plus grand nombre : les Travailleurs !
Sa vie est celle de tous les siens. Né de parents pauvres, il fut tour à tour ouvrier emballeur, pion, dessinateur sur étoffes.
En 1848, il est aux barricades comme en 1871 à la Commune. Après la défaite, il prend le chemin de l’exil, il végète en Angleterre, en Amérique, puis, à l’amnistie, vieillard de plus de soixante ans, il rentre dans son cher Paris, perclus de douleurs, paralysé, sans fortune, dans l’impossibilité de gagner sa vie.
En 1887, il s’éteint.”


ISBN 9791094773666

Imaginaire n°573
vendredi 24 novembre 2023
inspirée par
“Eugène Pottier,
un défenseur du prolétariat”
d’Ernest Museux
 
La défense du prolétariat, une blague ?
 
LE TEMPS D'UNE FICTION
 
Troisième empire, 2 décembre 2027.
Versailles
— On claque un pognon de dingue, et certains n’arrêtent pas de m’appeler sur mon zéro-six ! Comment faire, très chère Brigitte ?
— Le mieux, chouchou, ce serait, après un beau discours... tu es si exceptionnel en cet art de la rhétorique... de proposer un “Grenelle du Travail”.
— ...“Travail” ? Le mot est dévalué en ce moment... je pencherais plutôt pour... je ne sais... “Grenelle de l’Employabilité”.
— Votre majesté...
— Oui Bernard... pourquoi me déranges-tu en mon conseil ?
— C’est que... la foule, dehors, est de plus en plus échaudée.
— On ne lui a pas diffusé mon dernier discours lors de ce fabuleux banquet ?
Bernard Cassenœuf, Grand Chambellan du Trône, semble ennuyé.
— C’est-à-dire que vos conseillers en image ont pensé que l’aréopage de ces hauts personnages de la high-tech et le baisemain que fit Elon à notre impératrice fut assez mal perçu.
— Les gens du peuple, décidément, n’ont aucun savoir-vivre ! Quelquefois, cela m’ébaubit, mais m’attriste aussi.
— Vous êtes bon, mon très cher époux.
Brigitte prend la main d’Emmanuel Ier et la lui tapote affectueusement.
— Je sais, je sais, ma bonté est immense, et j’en suis la première victime.
L’Empereur laisse échapper une larme.
— Le lacrymatoire ! crie Brigitte.
Aussitôt, un homme, courbé comme il se doit devant Sa Majesté, accourt.
— Mon bon Anuel... merci.
Brigitte, délicatement, recueil dans le petit récipient la goutte majestueuse.
— Pardonnez mon impertinence, mais pourquoi l’appeler ainsi... : “Anuel” ?
L’Empereur a un sourire aimable.
— Parce que cet ancien ministre d’un de mes prédécesseurs, lorsque nous étions encore sous le régime désuet, avait un prénom qui ressemblait fort au mien... Manuel ! Pensez-donc ! Que ne jaserait la populace.
— Fort judicieux, Votre Majesté, répond très obséquieusement Bernard.
— Mais il ne passera pas l’année ! rit Brigitte... toute seule.
Les deux autres la regardent assez interloqués.
— Plaît-il ?
— Chouchou... “Anuel”... “Année”.
Le visage de Sa majesté rayonne.
— Oooh comme cela est divertissant, ma douce.
— Gondolant... Votre majesté, vous excellez dans la facétie.
— Mon épouse, vous me distrayez bien de ma triste condition.
Une pierre éclate un carreau de la Salle du Trône et vient rouler à proximité du couple impérial.
— Qu’est cela ? Une protestation ?
— Il semblerait que ce soit pire, Votre Majesté.
— Oh ? Un trouble ?
L’Empereur regarde son Grand chambellan, d’un air effaré.
— Pire...
— Je n’ose prononcer le vocable... sera-ce une insurrection ?
— J’ai bien peur que le terme soit en dessous de la réalité.
— Mordious ! Ne me dites pas que c’est là une émeute !
— Chouchou... fais attention a ton cœur, si bienveillant à l’égard de ces ruffians.
— Non, non, il faut que je comprenne. Alors, Bernard... dites-moi tout, révélez-moi la vérité.
Bernard Cassenœuf, assez gêné semble-t-il, se racle la gorge.
— Ahem... une “révolution”, Votre Majesté.
Emmanuel s’adosse au trône, las, paume sur le front.
— Quel désarroi ! Moi qui suis le plus grand défenseur des travailleurs. Quelle déconvenue.
— Je vais de ce pas haranguer la bonne foule, afin de leur délivrer mon message d’espoir.
...Quelqu’un coupe la parole aux acteurs sur la scène.
— C’est n’importe quoi cette pièce, mon ami. Jamais ne la programmerais.
— Mais pourquoi donc ?
— Parce que Sa Majesté Louis xvi n’aime pas la fiction. Une révolution ! Diantre ! Et pourquoi pas une République ?