Il y a des évènements, comme ces “massacres de septembre”, qu’il est difficile d’accepter avec notre pensée moderne, avec nos valeurs acquises, justement, à la suite de moments aussi paroxysmiques.
Pour paraphraser, l’Histoire est pavée de massacres. Faut-il les excuser : non ! Faut-il les comprendre : oui !

EXTRAIT

“Frères et amis, un affreux complot tramé par la cour pour égorger tous les patriotes de l’empire français, complot dans lequel un grand nombre de membres de l’assemblée nationale sont compromis, ayant réduit, le 9 du mois dernier, la commune de Paris à la plus cruelle nécessité d’user de la puissance du peuple pour sauver la nation, elle n’a rien négligé pour bien mériter de la patrie. Après les témoignages que l’assemblée nationale venait de lui donner elle-même, eût-on pensé que dès lors de nouveaux complots se tramaient dans le silence, et qu’ils éclataient dans le moment même où l’assemblée nationale, oubliant qu’elle venait de déclarer que la commune de Paris avait sauvé la patrie, s’empressait de la destituer pour prix de son brûlant civisme ? À cette nouvelle, les clameurs publiques élevées de toutes parts ont fait sentir à l’assemblée nationale la nécessité urgente de s’unir au peuple, et de rendre à la commune, par le rapport du décret de destitution, le pouvoir dont elle l’avait investie. [...]”

ISBN 9782851221025

Imaginaire n°601
lundi 29 janvier 2024
inspirée par
“La Commune”
de Louise Michel
 
La commune... c’est aussi un endroit commun où nous partageons tant de souvenirs.
 
SOUVENIR
 
— Henri, te rappelles-tu quand nous étions enfants, et que nous jouions dans cette cour ?
— Oui Jules, mon chéri, c’était il y a si longtemps.
Henri et Jules sont de retour dans le village de leur enfance, Banac, en Corrèze. C’est un village déserté, comme beaucoup. Les pierres sont encore là, mais parcourus par les mulots ; quelques oiseaux ont nidifiés et de temps en temps, lapins, sangliers ou vipères traversent ces maisons oubliées.
— Si on s’installait pour le pique-nique, Jules.
— Oui... tiens, ici, ce petit muret face à la montagne. On y sera bien.
Henri ne s’attendait pas à cette idée, lui se voyait assis sur une bonne chaise, à table. Mais à y regarder de plus près, il était évident qu’il devrait se contenter de ce petit muret de pierres, et après tout, il y avait quelque chose de charmant à s’installer là.
— Tu te rappelles de notre premier baiser... ?
— Oui Henri. Attends. Ce n’était pas justement en face ?
Henri sourit à son mari.
— Exact, juste là... regarde !
Il montre du doigt le haut de cette petite montagne, où l’on distingue une grande croix de pierre, éclairée par le soleil de cette fin de matinée chaude.
Jules tend la tête en avant, comme s’il voulait se rapprocher au plus près de l’endroit.
Une larme coule sur sa joue.
— Allons, mon tout beau, lui dit doucement Henri en lui caressant les rares cheveux qu’il lui reste.
— C’était il y a si longtemps, mon amour.
Soudainement, dans un silence commun de souvenir, tous deux se tournent vers leur passé.

***

— Jules, si on allait faire un pique-nique ?
Il fait si beau en cette fin de journée de juin 1979.
— Bonne idée... je vais aller prévenir ma mère.
— Okay, moi j’ai déjà l’autorisation paternelle... je t’attends.

***

Main dans la main, comme deux amis de longue date, Henri et Jules arrivent en haut de la petite montagne juste en face de l’école de Banac. Une grande croix de pierre, érigée en mémoire d’une obscure bonne-sœur sous la Révolution, domine le sommet.
Les deux amis s’assoient sur le cube de pierre supportant la croix. Silencieux et un peu haletants de leur montée, toujours main dans la main, ils regardent au loin, de l’autre côté... leur école et leurs camarades de classe finir la journée par une partie de foot.
Soudainement, alors qu’ils s’aperçoivent qu’il n’y a personne et qu’ils sont seuls, se tournant l’un vers l’autre, ils rapprochent leur visage, et leurs lèvres enfin osent ce qu’ils cachaient profondément dans leur âme... aux autres et surtout eux-mêmes.
Leur commune passion.