Imaginaire n°605
mercredi 7 février 2024
inspirée par
“La luxure comme bréviaire”
de Félix Nogaret
L’archéologie peut être source de danger...
LE SECRET DU DERNIER PHARAON
Égypte, 23 juillet 1885, Sir John Hawkind remet son casque sur son crâne.
— Il fait une de ces chaleurs, Matthew... insupportable.
Matthew Paldwind, qui accompagne le professeur Hawkind dans ses recherches archéologiques, à la poursuite de l’hypothétique tombeau de Ptolémée XVI[1].
— Professeur, c’est le désert !
Sir Hawkind goute assez peu l’humour de son jeune assistant.
— Mon jeune ami, pensez-vous réellement que je ne le sais pas ?
— Pardonnez-moi, professeur... la chaleur me tape sur le crâne aussi.
C’est à cet instant précis que faisant un pas en avant, Matthew disparaît dans le sable, comme aspiré par le bas.
— Matthew ! crie le professeur.
— Ça va, ça va... je n’ai rien professeur.
Ce dernier se penche avec précaution afin de regarder au fond du trou devant lui.
— Quel est cet endroit ?
— Je ne sais pas... il fait noir.
— Matthew, ne bougez pas, je vais venir.
Le professeur retourne non loin, au camp, où sont les porteurs et surtout Sélim, le guide égyptien, “prêté” par le Musée du Caire.
— Sélim, nous avons trouvé une excavation dans laquelle le jeune Matthew est tombé sans se faire de mal. Tu vas m’aider à le rejoindre.
— Bien, bien, Hawkind afthendis[2], tout de suite.
***
Entouré par l’obscurité de cet endroit mystérieux, le professeur ressent comme un espoir.
— Selon mes recherches, si c’est ici le tombeau de Ptolémée XVI, nous devrions avoir son cartouche quelque part.
— Vous connaissez le cartouche de ce pharaon ???
Matthew est impressionné.
— Oui, mon jeune ami... je l’ai trouvé dans les chroniques de Psousennès d’Antioche.
Le professeur allume la lampe à pétrole et la tendant en avant, ils peuvent admirer ce qui les entoure.
Ils sont au centre d’une grande salle dont le plafond très bas est soutenu par des rangées de petites colonnes peintes.
— Allons par là, mon jeune assistant.
Le professeur a l’air d’être si sûr de lui, comme s’il connaissait déjà l’endroit. Matthew commence à être légèrement perplexe. Il suit avec prudence.
Au bout d’un certain temps, toujours entourés de ces colonnes innombrables, ils arrivent face à une paroi décorée de dessins représentants le passage du monde des vivants au monde des morts.
Et au centre, entouré d’un filet d’or. Un cartouche.
— Bordel de dieu ! blasphème Sir Hawkind, le cartouche !
Tous les deux approchent leur visage de celui-ci.
— Regardez professeur, on dirait que cet œil au centre ressemble à un bouton.
— Vous avez parfaitement raison... je vous félicite Matthew.
Avançant la main vers l’œil, le professeur tremble.
Sous la pression de sa main, l’œil rentre dans la cloison, et dans un fracas d’outre-tombe, la paroi se scinde en deux, laissant apparaître une autre salle, qui de plongée dans le noir s’illumine de lumières, comme par magie.
Matthew et le professeur sont époustouflés.
— Oh !
Posant la lampe à l’extérieur, le professeur et son jeune assistant rentrent dans ce lieu. Les murs sont d’une beauté extraordinaire, des scènes représentants la vie du pharaon les décorent, et les contours de ces œuvres figuratives sont peints à l’or. Sur un socle d’or, il y a un énorme sarcophage.
— Enfin ! Je vais le trouver, s’écrie Sir Hawkind, dans un état de fébrilité qui inquiète de plus en plus le jeune Paldwind.
— Quoi donc, professeur ? La momie ?
— Non, jeune écervelé... le livre !
— Mais quel livre ?
— Le livre des morts ! Le bréviaire d’Anubis. Selon le récit que j’ai pu lire de Psousennès, le jeune Pharaon l’aurait emporté avec lui dans la mort !
À cet instant précis. Les lumières étincelantes disparaissent et la paroi ouverte se referme sur eux.
Sélim est resté au bord du trou qui s’effondre devant lui, manquant de l’aspirer.
Ayant repris ses esprits, il appelle, désespéré.
— Professeur ? Professeur ? Monsieur Paldwind ?
[1] Il serait le fils du précédent, que l’on connaît sous le nom de “Césarion”. Ptolémée xvi serait donc le petit-fils de Jules César et de Cléopâtre (VII).
[2] Mot du grec médiéval, authentès (αυθεντης), prononcé afthendis (seigneur, maître), sert à désigner les gens de loi, les fonctionnaires civils, les savants, les lettrés.