“Denis éditions” éditions artisanales - Plus qu'une édition, une envie de partage
Autre manière de dire “Ni dieu, ni maître”. Il est bien question ici de l’inutilité de se prendre un chef, un soi-disant supérieur, qu’il soit physique ou spirituel d’ailleurs (Denis éditions a publié déjà “Douze preuves de l’inexistence de dieu” de Sébastien Faure).

EXTRAIT

“Nous ne sommes plus au temps fabuleux de Saturne où le père dévorait ses enfants, ni au temps judaïque d’Hérode où l’on massacrait toute une génération de frêles innocents ; ce qui, après tout, n’a pas empêché Jésus d’échapper au massacre et Jupiter à la dévoration. Nous vivons à une époque où l’on ne tue plus guère les enfants par le glaive ou la dent, et où il paraît assez naturel que les jeunes enterrent les vieux. Enterrons donc tout ce qui a fait son temps. Hercule est mort, pourquoi chercher à le ressusciter ? on ne pourrait tout au plus que le galvaniser. La massue est moins forte que l’idée.
À toute idée présente et à venir, salut ! L’autorité a régné si longtemps sur les hommes, elle a tellement pris possession de l’humanité, qu’elle a laissé partout garnison dans son esprit. Aujourd’hui encore, il est difficile, autrement qu’en idée, de la saper de fond en comble. Chacun des civilisés est pour elle une forteresse qui, sous la garde des préjugés, se dresse en ennemie sur le passage de la liberté, cette envahissante amazone. Ainsi, tels qui se croient révolu- tionnaires et ne jurent que par la liberté, proclament néanmoins la nécessité de la dictature ; comme si la dictature n’excluait pas la liberté, et la liberté la dictature.”

ISBN 9782851221216

Gazette n°526
lundi 7 août 2023
inspirée par
“À bas les chefs !”
 
La vie est un long fleuve à la con...
 
L’BON TEMPS ?
 
Je me souviens, lorsque j’étais chez les scouts. “C’était l’bon temps” me suis-je mis à penser avec un sourire narquois.
Je devais avoir neuf ans quand j’ai intégré la troupe des scouts de Bagneux.

***

— Armand, t’as vu la gueule du nouveau dis ?
— Tu parles, Antoine !... on risque de bien s’amuser.
— Bien, mes petits, voici notre nouveau compagnon louveteau... Marcel, s’adressa Jacqueline, la cheftaine.
J’ai vu les regards goguenards de mes nouveaux “copains” à l’énoncé de mon prénom.
— Faites connaissance, ensuite nous nous préparerons pour aller à l’office de 17 heures, avec le père Sylvestre.
Elle s’est éloignée et m’a laissé, entouré de ces “gentils membres”.
— Woooa, regardez sa dégaine à çui-là, a dit le grand dadais... Antoine.
— T’as raison... on le bizute de suite ou on attend que l’aut’soit plus loin ?
Il devait s’agir évidemment de Jacqueline, qui d’ailleurs au même moment rentrait dans la petite maison qui servait de bureau et de salle de jeux.
Ils étaient cinq ou six. Je ne faisais pas le poids pour me défendre. Si bien qu’en peu de temps, je me retrouvais saucissonné à un arbre.
— Y gueule pas... a dit le mec Antoine.
— Nan, t’as raison.
— Tiens, Laurent, et si on jouait aux fléchettes ?
— Super idée, on va s’poiler, a renchérit un autre, et celui qui touche, y gagne le point !
— Essayez toujours... ça va être votre fête, que j’ai dit en fronçant les sourcils.
— Tiens, mais y cause donc l’asticot, se bidonnait l’Antoine... apparemment leur “chef”, et tu vas faire comment ?
Il faut dire que ces cons ne savaient pas attacher correctement, et moi j’avais déjà une petite expérience... avec ma cousine, Marie.
Je souriais déjà.
— Comme ça, la brindille, que j’ai dit en souriant méchamment tout en laissant choir la corde qui ne me retenait plus.
J’ai foncé direct sur “le chef”, lui assenant un direct du droit mastoc dans les gencives.
Il s’est écroulé en arrière, tombant sur le sol comme une branche pourrie.
Les autres étaient médusés. Ils me regardaient comme si j’étais un diable sorti d’une boîte.
— Alors ? Y a d’autres prétendant ?
Je me rappelai le visage de Jules Berry dans “Les visiteurs du soir” qu’on avait vu en famille quelques jours auparavant. Je pris le même sourire méphistophélique. Ça m’amusait de les voir soudainement changés en statues peureuses.
L’Antoine se tenait la mâchoire en maugréant des insultes sur ma mère.
Mais il eut la surprise de sa courte vie, car quand je me suis rapproché de lui, toujours à terre, il a levé les bras pour se protéger le visage. Mais, comme dans “Les aventures de Robin des Bois”, avec Errol Flynn... la bagarre sur le rondin de bois où Robin tend la main à son “adversaire”, je voulais plutôt lui tendre cette main amicale que de le massacrer.
Il m’a regardé effaré, stoïque, avec ses grands yeux. Puis il m’a souri, tendu le bras pour que je l’aide à se relever.
— Ok, mec... t’es le nouveau chef !
Toujours à la manière de Berry...
— Y a pas d’chef avec moi... on est tous des potes.
Après, c’est parti en cacahuète : on a joué à la guerre et fait les cons...
Tu parles de “bon temps” !
 
Épinac, le 7 août 2023