Des nouvelles héroic fantasy dans un autre monde, sorti de l’imagination de l’auteur : Alnébé. Un monde avec son histoire, ses nations, ses dieux et... ses habitants. “En cherchant dans les archives de la grande bibliothèque de Shâass, à Améasha, j’ai trouvé un vieux grimoire poussiéreux, aux pages jaunies à force d’oubli... on y raconte certaines légendes.”

- Adhjin Delph, le dragon rouge
- Töl de Frö, le brasier de khopjot
- Janis, une sandale verte à boucle d’argent
- Ramna Palde, l’amour perdu d’adramapur
et en supplément :
Lettres-nouvelles de l’Alnébé
...et en page suivante, la carte géopolitique de l’Alnébé, dessinée par Saarnël de Glad en l’an 2000 (fond de la Bibliothèque de Nalern).

EXTRAIT



“ADHJIN DELPH
LE DRAGON ROUGE

— Attention Träar !
Un gros pachyderme yslislien venait de frôler de près le photographe de la gazette de Mäar-la-Trull, pour un peu il se faisait empaler.
Fär était envoyé ici, à Prälie, pour rendre compte du campement des suns, pauvres hères déplacés au grès des expulsions. La mairie de Prälie, aux mains de la Caste Sangermanopratine faisait tout son possible pour apparaître dans les journaux sous son meilleur jour, pouvant compter sur l’abnégation du service de presse légale.
Une décade plus tôt, les suns avaient été expulsés de Läkpelle, un boulevard de Prälie, et en ces quelques jours ils s’étaient réinstallés ailleurs, dans une halle abandonnée. Mais dans l’empire d’Yblisl, seuls les privilégiés peuvent aller et venir sans permis de route.
— Fär ! C’est encore loin le machin où tu veux aller ?
— Non non ! Tiens… on voit déjà les pachydermes des Corps de Réhabilitation Sociale, ils doivent attendre la sortie des conseillers municipaux, chargés de la fluidité solidaire.
[...]”

ISBN 9782851220424

Gazette n°541
lundi 11 septembre 2023
inspirée par
“Chroniques de l’Alnébé”
André Janus
 
L’inconnu n’est pas sans danger.
 
TROP TÔT
 
“3 Septembre 1936
Institut de recherches
et d’études cosmiques
Firenze
Cher Professeur Baldini,
Suite à votre lettre, j’ai entrepris la lecture de votre rapport que vous m’avez fait parvenir.
Le lancement de votre appareil, depuis la Sicile, me paraît être la meilleure des solutions.
Je vous apporterais toute l’aide nécessaire à la réalisation de votre projet si extraordinaire, dans un secret absolu.
Professeur Donatello Fossati”

***

Juillet 1949, sud-ouest de la Sicile
— Fabrizio !... Compte à rebours ?
— Bientôt, professeur Fossati.
Dans la nuit sicilienne, par un temps si clair que la voûte céleste est percée d’une myriade de petits points lumineux, le professeur regarde le spectacle, la main sur l’épaule de son jeune confrère, Fabrizio Baldini.
— Et dire que peut-être, parmi ces lumières, il y a sans doute une civilisation extra-terrestre.
Fabrizio sourit.
— Pour le moment c’est la Lune que nous explorons, professeur. J’espère que nos donateurs privés seront satisfaits.
— Surtout depuis que nous avons reçu cette émission radio.
Fabrizio se rembrunit. Pensif, il relève la tête et semble chercher une réponse en observant le disque lunaire.
— Et si...
— Si quoi, Fabrizio ?
— S’il n’y avait rien, si tout ceci n’était qu’une vaste erreur, une mauvaise interprétation des éléments ?
— Nous verrons bien. Il est temps ?
— Oui... il est temps !
Fabrizio appuie sur un gros bouton rouge, au milieu du tableau de commande juste en face de lui. Et dans le même instant, la fusée “Galileo”... forcément nommée ainsi, s’élève dans le vrombissement de ses moteurs.
— Alea jacta est ! s’exclame Fabrizio.

***

— Luigi ?... À vous, répondez !
Une voix lointaine se fait entendre enfin.
— Oui professeur, nous avons eu un problème avec l’antenne. Tout va bien. Nous approchons de la zone noire.
— Bien, bien... faites attention.
— Pas de souci... Aaaaah merde !
— Qu’y a-t-il commandant Luigi ?
— Des lumières ! Des lumières sur la surface lunaire...
— Bien ! Très bien... mais pourquoi ce “merde” ?
— Elles viennent tout juste de s’éteindre alors que nous entrions dans la zone.
Le professeur Fossati et son confrère, se regardent dans un long silence, effarés.
— Je ne sais quoi penser, dit Fabrizio, nerveusement.
— Professeuuuur ! Professeuuur !
— Oui commandant... qu’y a-t-il ?
— Il y a une lumière qui est apparue, par une ouverture, une sorte de gros œil sortant d’une bâtisse... la lumière grossit et devient rouge !
Le professeur Fossati, cette fois pris de panique, prend le micro à pleine main.
— Faites demi-tour !... Vous entendez ? Im-mé-dia-te-ment ! Faites demi-tour !
Un bruit sec lui répond, précédant le filet continu d’un bourdonnement radio.
Las, la tête penchée par terre, abattu, les épaules voûtées, le professeur repose tristement le micro.
— Trop tard !
— Ou trop tôt, lui répond son jeune confrère.
 
Épinac, le 11 septembre 2023