Comme son nom l’indique, c’est le “vade-mecum” pour une révolution réussie, un plaidoyer pour l’action prolétaire.

EXTRAIT

“Négation de l’existence d’un dieu réel, extra mondial, personnel, et par conséquent aussi de toute révélation et de toute intervention divine dans les affaires du monde et de l’humanité. Abolition du service et du culte de la divinité. Remplaçant le culte de Dieu par le respect et l’amour de l’humanité, nous affirmons la raison humaine, comme critérium unique de la vérité ; la conscience humaine, comme base de la justice ; la liberté individuelle et collective, comme unique créateur de l’ordre de l’humanité.”

ISBN 9791094773710

Imaginaire n°617
mercredi 6 mars 2024
inspirée par
“Le catéchisme révolutionnaire”
de Michel Bakounine
 
Et si on nous avait menti depuis... l’origine ?
 
SUSPICION
 
— Mes chers enfants, aujourd’hui nous allons parler de la “Tentation de Jésus” au désert.
Dans le sous-sol de l’église Sainte Gudule, le père Karl fait le catéchisme hebdomadaire aux jeunes louveteaux du groupe scout municipal.
— C’est là que Jésus a rencontré le diable, mon père ?
— Absolument, mon fils.
— Mais comment sait-on que Jésus a vaincu ?

***

Le désert est si chaud, le sable brûlant lui fait souffrir la plante des pieds depuis qu’il a perdu ses sandales alors qu’il courait, poursuivi par un lion du désert. Le ciel si bleu, éclatant, lui fait mal aux yeux. Il a tellement soif, surtout depuis que l’outre qu’il avait, est vide.
“Depuis combien de jours suis-je dans ce désert ?” pense-t-il.
Il lève la tête, ferme les yeux ; le soleil est tellement éblouissant.
— Père ! Ne m’abandonne pas !
Son cri s’abîme dans le souffle des vents de sable. Il baisse la tête, prêt à s’abandonner au désespoir. Soudainement il remarque à cet instant-même une ombre qui s’avance vers lui.
La fraîcheur de cette protection est si tentante. Il relève la tête, doucement, découvrant un homme.
D’abord, se sont ses pieds aux belles sandales à la boucle vermillon ; puis sa tenue, un long vêtement souple, blanc, chatoyant avec une ceinture dorée. Un sac pend à son côté. L’homme est de grande taille, bien plus que lui ; il a, comme ses jambes, de longs bras fins et musclés. Les yeux de Jésus rencontrent ceux de cet inconnu qui vient le sauver du feu du ciel diurne. Son visage est allongé, il a de longs cheveux lisses qui lui tombent sur les épaules. Mais ce sont ses yeux qui lui donnent son identité. Ils sont jaunes ; d’un jaune brûlant, brûlant intensément au fond de leurs orbites.
“Lucifer !” ce mot, ce nom, ce titre, traverse l’esprit fiévreux du fils de l’homme
. — Oui, c’est moi, dit “le sauveur”.
Il semble avoir perçu la pensée et il en est comme flatté d’être reconnu. Il sourit, d’un sourire glaçant et cruel.
— Que me veux-tu ? demande Jésus.
Bien qu’il sache déjà le pourquoi de la présence de cet ange déchu devant lui, la question a le mérite d’être claire.
— T’offrir mon aide, fils du très haut, mon frère... et te donner le pouvoir sur tous les royaumes du monde.
Jésus, affaibli par les trente-neuf jours qu’il vient de passer, seul dans ce désert, s’effondre sur le sol, à genoux, face au prince des démons.
Le dialogue s’engage alors entre ces deux fils de Yavhé. Puis, le diable qui s’est assis à côté de son jeune frère, sort une grosse gourde en peau et la lui tend amicalement.
Jésus tourne son visage vers la dune, refusant par là le don qu’on lui fait, si généreusement.
Le diable, qui s’attendait à sa réaction, ne s’en offusque pas et range tranquillement la gourde dans son sac.
Quelques heures plus tard, la nuit tombe. Ils sont toujours côte à côte, ils ne se regardent pas, Jésus ignore son “sauveur”, et le froid tombant maintenant, il se recroqueville sur lui-même pour essayer de se réchauffer.
Son grand frère, sort de son sac, qui pourtant semblait bien petit, des morceaux de bois qu’il dépose entre eux deux. Jésus, bien que frigorifié déjà, se tourne d’un autre côté, tandis que le diable allume le feu en touchant simplement les bûches.
Toujours voisins, ils s’endorment tous les deux, l’un tournant le dos à l’autre.
Le lendemain, vers midi, Jésus revenant enfin du désert, vers les siens, s’approche de sa mère. Il semble rayonnant, heureux, pleinement satisfait. Il porte un long vêtement souple, blanc, chatoyant ; une très belle ceinture dorée et aux pieds, on lui voit de belles sandales à la boucle vermillon.

***

Le père Karl, qui s’attendait à bien des choses, n’avait pas prévu celle-là.
— Mais parce qu’il l’a dit, voyons !
Les jeunes scouts qui suivent la catéchèse ont soudainement un regard suspicieux.