Imaginaire n°618
vendredi 8 mars 2024
inspirée par
“Le chansonnier de Bacchus”
d’un Collectif
 
“In vino veritas” paraît-il... slogan frelaté !
 
BALLADE DANS UNE GEÔLE
 
Il était là, seul, oublié de tous, à cette table, il touchait du bout des doigts le verre devant lui, et ce verre l’appelait comme le diable appelle sa victime dans un souffle, silencieux.
 
Il restait là, face à face avec sa torture, déchiré entre le désir d’y succomber et l’envie d’envoyer ce verre se fracasser contre le mur en face, cette idée le fit sourire, malicieux.
 
Il souriait, bêtement, baissant la tête comme pour mieux le voir de près ce sacré liquide rouge qui le narguait dans ce petit récipient sur une patte, et il ne se résolut pas, soucieux.
 
Il repoussait, d’une main tremblante le récipient et ceci agita d’une houle le vin contenu dedans, pourtant il n’en eut cure, il voulait lui dire son fait à son bourreau, pernicieux.
 
Il pensait, la tête dans ses paumes, toujours scrutant le réservoir de ses peines, de ses peurs, de ses haines, qui reposant à quelques centimètres de son gosier, le défiait, vicieux.
 
Il voulait, il en était sûr, ne pas céder à ses avances frelatées, comme ça se passait à chaque fois, avant de disparaître de lui-même au fond de ce petit verre, capricieux.
 
Il rêvait, se demandant si un jour il lui foutrait la paix une bonne fois pour toutes, et que loin de lui, il puisse revivre et pouvoir s’imaginer un possible, sans lui, fallacieux.
 
Il décidait, prenant la chose dans sa main, il vit bien que le liquide pensait avoir encore une fois vaincu sa faiblesse, mais il lui sourit, il tendit la main, astucieux.
 
Il tremblait, mais il fut sûr de lui et le vin était comme fou de rage, s’agitant en tous sens, ne voulant que sa bouche, d’un geste lent et volontaire, il le mit à terre, libéré, délicieux.