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Imaginaire n°784
mardi 1er avril 2025
L'OMBRE DE L'ÉCARLATE (VI)
- L’éclair mystérieux -
Berthe reste sur le pas de la porte, face à la petite Madeleine. Elle est ébahie, tout comme Colette.
La petite a l’air fatiguée, comme après une longue marche.
Mais ses longs cheveux, ébouriffés, au lieu d’être blonds, sont... roux ! Presque rouges.
Colette se précipite et prend sa fille dans ses bras, tandis que Berthe finit par partir en soupirant cyniquement.
— Madeleine ! Mais où es-tu donc passée ?
La petite, dans les bras de sa mère, tremble de tout son être. Sa mère s’en rend compte immédiatement et l’embrasse affectueusement, retenant ses questions.
Silencieuses, les deux restent sur le pas de la porte sans même bouger.
Puis, le regard de Madeleine plonge dans les yeux de Colette.
— Je ne sais pas. J’étais dans un hôpital, devant une vieille femme. Elle m’a souri, et d’un coup, elle a cessé de respirer. Ses yeux se sont mouillés de larmes. J’ai juste vu, au pied de son lit, un médecin et une infirmière. Tout s’est évanoui ensuite dans un éclair orangé.
— Mais comment cela est-il possible ?
— Je ne sais pas, maman, c’est comme si je n’étais pas dans mon corps. Mais dans celui d’un autre...
Elle semble réfléchir à ce qu’elle vient de dire et se reprend :
— ...Non, en fait, dans le corps “d’une” autre. Je t’assure, maman.
— Ce n’est pas grave, ma toute petite. Nous en parlerons plus tard.
*
Colette, après avoir laissé sa fille dans son lit, se remémore ce qu’elle avait lu dans les archives de la famille de son mari, après la mort de celui-ci.
“Il y avait un article dans Le Figaro...”, pense-t-elle.
***
— Oui, mon père. Les gens qui partageaient sa chambre, à l’Hôpital de la Charité, ont juste raconté une histoire incompréhensible d’un éclair orangé. Quand l’infirmière de garde cette nuit-là, le 30 mars 1936, est arrivée, elle n’a pu que constater la mort de ma mère.
— Réellement étrange.
— Je ne le vous fait pas dire, mais je m’en souviens maintenant que je vous en parle. Quand Madeleine l’a su, elle est devenue toute pâle. C’est après qu’elle a commencé ses voyages, démissionnant de son journal...
Le prêtre l’interrompt.
— Elle a donc fini par réussir à trouver un poste de secrétaire ?
Gustave, souriant avec compassion, le corrige gentiment :
— Non, mon père, comme journaliste à “La Revue Anarchiste”, qui d’ailleurs cessa de paraître juste après son départ pour le Pérou.
— Pourquoi le Pérou ?
Le curé est perplexe, plus par la destination que par la profession de Madeleine Lamorie.
— Elle s’était plongée dans des ouvrages anciens, qu’elle lisait à longueur de journée, à la Bibliothèque Nationale. Juste avant de prendre le bateau, elle m’a parlé d’une déesse inca, Ch’aska, et d’un lieu qu’elle soupçonnait être dédié à celle-ci, Qenko, à quelques kilomètres de Cuzco.
Le prêtre prend un air déçu.
— Elle a donc fini par renier le Seigneur en se tournant véritablement vers des dieux païens. Cela ne m’étonne pas vraiment, déjà petite, elle me taquinait.
— Oui, je sais... et ce n’était que son premier voyage, car elle en a fait d’autres.
— Ah ?
*
Madeleine, face à Tenzin, retient ses larmes qui coulent malgré elle.
— Tu vas te reposer, Madeleine Lamorie, nous discuterons de cela plus tard.
— Oui, Rinpoche. Mais j’aimerais comprendre, et...
— Repose-toi d’abord, car l’émotion peut être source de souffrances.
Le petit moine, resté silencieux jusqu’alors, hoche la tête.
***
Colette, prenant l’exemplaire jauni du Figaro du 24 décembre 1881 retrouvé dans les anciens papiers de Joseph Jarot, son mari, se met à lire l’article, juste après la rubrique “Les miettes de la politique”, en page deux.
”Nous apprenons le décès, dans des circonstances étranges, de madame Joséphine Jarot, née Thériard. Cette dame, issue d’une grande famille d’industriels de l’Est de la France, qui a compté parmi les siens deux généraux de l’Empire, de nombreux ambassadeurs et surtout l’évêque de Morteau-les-Mines, monseigneur Aldebert de Lansac-Thériard, qui faillit être pape durant le règne de Louis-Philippe. Comme chacun le sait, ce fut son éminence Giovanni Ferretti qui fut l’élu de Dieu sous le nom de Pie IX.
Ce sont les circonstances de ce décès qui intriguent la préfecture de Police et notamment Monsieur Macé, chef de la Sûreté, qui nous a déclaré : « L’étrange ne fait pas partie de mes compétences, j’arrêterai le moindre ectoplasme ! »
(suite au prochain épisode...)